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Vapeur et Ténèbres de Pierre-Olivier Lavoie

Vapeur et Ténèbres de Pierre-Olivier Lavoie (Luzerne Rousse)

Le monde n’est rien. Qu’un mensonge voilé par l’obscurité. Les hommes qui y vivent ne sont que de vulgaires insectes, des êtres obsolètes, des pantins qui n’attendent que d’être manipulés.


Isaiah ne souhaite qu’une seule chose : mourir. Mais c’est impossible puisqu’il est condamné à voir le temps s’écouler. Alors qu’il ne croit plus en sa mort, celui qu’on appelle Seigneur des Ténèbres reçoit une visite pour le moins inattendue. En échange du retour de la paix sur Terre, il aura enfin ce qu’il veut : rejoindre les siens dans l’au-delà.


La réalisation de son souhait le plus cher vaut-elle la peine de redevenir le pantin du Pouvoir?


En commençant ce livre, je n’étais clairement pas prête à lire ce que j’ai lu. En fait, je sortais d’une longue lecture et j’ai eu peur, car la plume de l’auteur est assez lourde. Mon cerveau n’était pas préparé à plonger dans l’univers de Isaiah. En fait, même préparé, je crois qu’on ne l’est jamais réellement. Il y a quelque chose de puissant avec ce roman qui m’a déstabilisé. C’est même la première fois que je dois arrêter ma lecture en plein milieu, parce que mon cerveau ne suit plus le rythme. Laissez-moi vous expliquer pourquoi.


En premier lieu, comme d’habitude, un mot sur l’auteur. Pierre-Olivier Lavoie est un jeune homme que je qualifierais de mystérieux. Il a une plume extraordinaire, mais une aura se dégage de ses œuvres qui se retrouve chez lui également. Je ne sais pas grand-chose, outre qu’il a décidé d’écrire ses propres romans après avoir cherché, en vain, ce qu’il voulait lire dans les livres des autres. C’est ainsi que sa série « Les chroniques de Victor Pelham » est né entre ses mains. Sa série comporte plusieurs tomes, dont, si j’ai bien compris, des spins off en bon anglais. Il travaille présentement sur un sixième tome. C’est après une absence du milieu littéraire qu’il publie chez Luzerne Rousse au début de 2019 son roman « Vapeur et Ténèbres ». Il écrira également en 2020, un sequel/spin off de ce livre lors du projet des Feuilletons des Pousses avec sa nouvelle Rats et Corbeaux.


Vapeur et Ténèbres, qu’est-ce que c’est ? C’est un gros mystère. Sur la description du livre, on nous présente Isaiah, un Seigneur des Ténèbres qui ne souhaite que mourir après une trop longue vie. C’est en embarquant dans ma lecture que je me suis rendu compte que ce livre fait partie du genre de la Bitlit qui selon Wikipédia se décrit comme suit : « Le genre met en scène une héroïne confrontée au surnaturel ainsi qu'aux tracas de la vie quotidienne. Il n'est pas rare que l'héroïne soit elle-même un personnage surnaturel, telle une sorcière, une fée, un nécromancien, un lycanthrope, un vampire ou une télépathe. » Le roman est présenté comme fantastique, historique et horreur. C’est en plein dans le mile. Normalement je n’aime pas trop la Bit lit et pourtant, ce roman, il m’a absorbé.


Ce que j’ai adoré, c’est que le personnage principal, Isaiah Attwell est détestable à mourir. Il n’a rien de joyeux, il est sombre, antipathique, je dirais même chiant. Il est déprimant et tu as juste envie qu’il crève, enfin ! Bon, lui aussi désire le même souhait. J’ai trouvé ça surprenant et j’ai beaucoup aimé. Ça change des personnages rose bonbon qui sont menés par une quête et qui sont optimistes. Isaiah veut juste en finir pour de bon et qu’on lui « sacre patience ». Ironiquement, je crois que le fait qu’il soit aussi détestable m’a amené à l’aimer de tout mon cœur. J’ai ADORÉ ce personnage. Il me semblait vrai et unique. Et il me faisait penser à moi à certains moments de ma vie. Sans l’envie du sang.

L’histoire commence à la fin des années 1800 en Allemagne, encore là, c’est peu commun, mais pourtant si intéressant ! L’auteur avait une facilité déconcertante à décrire les lieux comme s’il avait été présent à cet endroit, à cette époque. C’est presque effrayant.


En fait, comme je suis partie sur l’écriture de l’auteur, je dois en parler. C’est hallucinant. Sa plume est poétique, certes, mais c’est plus que ça. Elle fait vibrer, elle te fait vivre et voir. Il arrive à décrire avec une telle précision l’environnement que ça aiguise absolument tous les sens du lecteur. À certains moments on arriverait presque à entendre les vibrations qu’Isaiah ressent, à goûter le sang sur ses lèvres, à sentir l’odeur putride qui règne la majorité de l’histoire. On pourrait presque même sentir la neige chatouiller la plante de nos pieds. C’est une totale immersion des sens comme je n’avais jamais ressenti avant.

Quant à l’histoire, elle a quelque chose de mystérieuse qui est assez imposante. Si on parle souvent de brume, croyez-moi, vous allez la sentir sur votre peau continuellement. Même les personnages, on n’en sait pas plus sur eux, même Isaiah qui est victime d’une amnésie partielle due au temps qu’il a passé sur la terre.


Bien qu’il se définisse comme Seigneur des Ténèbres, on n’est pas complètement certain de ce qu’il est, même si on s’en doute. Le fait qu’il brûle au soleil, a de la difficulté avec l’argent et boit du sang nous indique pas mal un vampire. Cependant, l’auteur a réussi à sortir de certains clichés et à modifier les choses à son avantage. En exemple, Isaiah arrive à supporter temporairement le soleil, bien que ça le brûle. Il a une révulsion du sang qu’il doit ingurgiter et le sang qu’il consomme peut lui donner des pouvoirs. Un sang animal lui donnera des sens bestiaux. Un sang de sorcière lui fera découvrir des capacités et même qu’en buvant le sang de quelqu’un, il arrive à incorporer son odeur. Cette sortie des sentiers battus m’a fait apprécier ma lecture, parce qu’on s’éloigne de Twilight ou de Vampire Academy. On en est même très loin.


Les émotions que vit Isaiah sont puissantes et je dirais même douloureuse. On ressent sa peine avec une telle profondeur qu’en fermant le livre à la moitié, quand mon cerveau n’en pouvait plus, j’ai pleuré. J’ai suffoqué. Je ressentais tout en même temps. Si j’avais une preuve que la magie existerait, je dirais que ce livre en est imprégné.

Les descriptions des créatures sont également profondes. On comprend les sorcières, on les imagine très bien, comme celles un peu plus démoniaques. « Obscur » en fait, car c’est bien expliquer que le concept de Dieu et de Satan n’existe pas réellement. Il y a de la lumière, des ténèbres et d’autres éléments nécessaires au balancement du monde.


Quand on lit le livre, aussi, on se demande qui est le méchant. Est-ce Isaiah ? Est-ce les politiciens qui l’utilisent ? Les sorcières qu’il doit tuer ? L’Église elle-même ? Et si je vous disais : tout en même temps ? Pierre-Olivier arrive à nous montrer que chaque partie à un rôle chaotique à jouer dans l’ordre du monde. Ils sont chacun « méchant » à leur manière, mais le « big boss » est une surprise de taille. Si je peux citer la critique qu’a faite Cynthia Carbonneau envers son collègue auteur : « La lumière n’est pas toujours la solution ». Je n’aurais pas pu dire mieux. Le débat intérieur de Isaiah nous montre qu’il est difficile de savoir qui fait le bien et qui fait le mal. Peut-être que chacun fait un peu des deux, selon la perspective dans lequel on voit le tout ?


Un autre élément, c’est la quantité de détail qui a dans le livre. Pierre-Olivier a touché dans le mille à plusieurs endroits dans son livre. À chaque fois que je disais « Oui, mais…? » je lâchais un « Oh » quelques secondes plus tard. Il pensait absolument à TOUT. Chaque action, chaque geste, chaque idée a son but précis. Et même si certaines découvertes se font plus tard, tout est très bien placé. Ce livre est un jeu d’échecs que le lecteur ne pourra jamais gagner.


Quant à l’autre détail qui m’a plu : L’HISTORIQUE. J’aimerais m’incliner devant cet auteur. Il a réussi à m’immerger dans mes périodes favorites. L’utilisation de la 3ème croisade était du génie et celle-ci est quand même très peu utilisée dans les romans contenant une touche historique, certains se contentant de la première. Puis, l’impact de la religion, surtout dans l’ambiance mouvementée du règne d’Henri VIII qui est mon personnage historique préféré, c’était absolument parfait.


Avant d’entrer dans les petits points négatifs, je vais finir sur le positif avec ceci : la fin est digne d’un génie. Elle est absolument malade mentale. J’ai terminé ma lecture la bouche ouverte, béante, je n’en croyais pas mes yeux. Tellement d’information et pourtant, tellement de sens. J’ai été échec et mat avant même de me rendre compte que je jouais une partie. Alors pour ça, j’aimerais qu’on applaudisse l’auteur.


Quant au négatif, il n’y en a pas beaucoup. En fait, c’est juste des trucs qui m’ont chicoté.

L’histoire est quand même assez longue avant qu’on arrive au bout où l’on arrête plus, car on découvre tout. Je dirais même que ça traîne en longueur à plusieurs endroits et que ça peut rendre la lecture difficile, car la plume de l’auteur est lourde et dense. Cela peut freiner la lecture de plusieurs, car même moi, après un moment, j’attendais un peu plus de réponses.


Même si j’ai adoré les scènes de flashback pour avoir les souvenirs d’Isaiah, j’ai trouvé ça un peu étrange de la façon dont ça s’est fait. Un peu trop soudain, surtout après avoir lu deux cents pages qui traînaient légèrement des pieds.


Lorsque Isaiah est avec Arno, la répétition du mot « Monsieur » à toutes les phrases m’était insupportable. En fait, il y a de nombreuses répétitions dans le texte qui sont présentes dont « Seigneur des Ténèbres » [NDA : à chaque fois j’imaginais Voldemort…], « brume », « vapeur ». Par contre, je suis quelqu'un qui fait beaucoup de répétitions, alors je ne critique pas le tout en entier. C'est simplement le "Monsieur" qui était à mon avis, de trop tout le temps.


Izlodel est fatigant. Je comprends son utilité et j’ai fait un « oh » quand j’ai découvert son identité, mais c’est le personnage le plus atroce que j’ai pu lire dans un livre. Il me tapait sur le système comme pas possible. Je crois qu’il a été écrit pour ça, mais dès qu’il apparaissait j’avais envie de plonger la main dans le livre pour le tuer.


J’ai parlé de l’histoire en longueur, je dirais aussi que c’est répétitif à plusieurs moments aussi, car il y a beaucoup de combats. Il rencontre quelqu’un, il se bat, il y a du sang, la gorge est arrachée, encore plus de sang, etc. Ça se ressemblait pas mal rendu au 4ème.


Je dirais que cette longueur et ces répétitions expliquent ma note finale. Même si ce ne sont que des détails, ça m'a titillé assez pour que je ne puisse dire que le roman est parfait.


Et dernier point pas négatif, mais je crois qu’il y a une petite erreur de temps (ou moi de compréhension), mais vers la fin, Eon dit à Isaiah qu’il n’a à peine un siècle de vie, alors qu’ils sont en 1509, lors de la montée au trône d’Henri VIII. Or, Isaiah a été « transformé » en 1191 lors de la 3ème croisade, ce qui fait une différence de 314 ans, donc trois siècles. C’est l’historienne en moi, navrée.


Dans sa forme générale, c’est un excellent livre. Bien qu’il soit lourd (pas une mauvaise chose !) et même difficile à lire, l’auteur a réussi à offrir quelque chose de nouveau dans un style en essoufflement. J’ai été agréable surprise et même si je trouve la fin cruelle, car il n’y a pas de suite et qu’on doit tout imaginer, je ne regrette pas ma lecture.


Note finale :


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