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Psychose d'Ariane Charland

Psychose d’Ariane Charland (Éditions de Mortagne – Collection Tabou)

Je suis devenu fou à dix-sept ans. Je l’étais peut-être déjà avant, mais c’est là que ça s’est déclaré, que la psychose a pris le dessus et que la paranoïa m’a englouti.


La vie semblait pourtant me sourire. Je commençais le cégep, j’avais un bon emploi et je venais d’emménager avec mon meilleur ami, à deux pas des résidences où ma blonde habitait. C’était le bonheur, la liberté totale !


Sauf que ça n’a pas duré. Le stress des études, le travail qui me prenait trop de temps, les nuits blanches, l’alcool, le pot… Quelque chose s’est rompu à l’intérieur de ma tête. Mon esprit s’est détraqué. Je me suis mis à voir des ombres, à entendre des voix, à m’imaginer qu’on me voulait du mal…


J’aurais dû écouter mes amis et aller me faire soigner. À la place, j’ai attendu qu’il soit trop tard. Je me suis battu contre ma folie et j’ai perdu.


La psychose est un trouble mental grave qui se manifeste par une perte de contact avec la réalité. Les personnes qui en sont atteintes éprouvent beaucoup de difficultés à distinguer ce qui est vrai de ce qui ne l’est pas. On estime que de 4 à 5 % des jeunes connaîtront un épisode psychotique. Heureusement, avec les bons traitements, la majorité d’entre eux s’en sortiront.


Sur toutes les œuvres d’Ariane, pouvez-vous croire que le premier livre que je lis d’elle est celui-ci? C'est sa dernière oeuvre publiée ! J'ai du retard dans ma découverte d'auteurs québécois... Parfois, j’attends avant de lire un roman parce que je me dis qu’il ne m’intéresse pas complètement et je me retrouve surprise 99% du temps. C’est ce qui est arrivé avec ce tabou-ci. Quelquefois c’est un coup de cœur, parfois c’est une catastrophe. Pour Psychose… vous verrez.


Ariane Charland est une auteure prolifique ayant à ce jour son nom sur quinze œuvres depuis 2012 ! Avant de signer son premier contrat, elle est consciente que vivre de sa plume est difficile, alors elle s’inscrit à l’Université de Montréal en traduction, domaine qui lui procurera un baccalauréat et un travail depuis quinze ans. C’est finalement avec le premier tome de sa série Aïnako, publié chez Michel Quintin qu’elle va faire ses premiers pas en tant qu’auteure. Entre 2012 et 2014, six tomes de Aïnako sont publiés ! Après une pause de publication de deux ans, elle rejoint la famille Tabou en publiant « Comme un coup de poignard » parlant des douleurs sexuelles en 2016. En 2017, elle ne publie pas un roman, mais trois ! Son deuxième tabou, Corps étranger qui parle de la paralysie irréversible voit le jour. C’est également la sortie en parallèle chez Michel Quintin des deux premiers tomes de sa nouvelle série « La double vie de Rosalie ». En 2018, elle publie son troisième tabou « Indésirable », ainsi que le troisième tome de Rosalie. En 2019, elle fait paraître un quatrième roman dans la Collection Tabou : Psychose et participe avec trois autres auteures, en 2020 à l’écriture de Sans Tabou.


Psychose. Quand il a été annoncé, j’ai été un peu mitigée. Le sujet est bel et bien tabou, mais est-ce que ça me rejoignait moi ? Pas tout à fait. J’ai vu quelqu’un atteint de ce trouble et c’est effrayant. Pénible oui, stressant, atrocement, mais effrayant est le mot juste. Je n’étais pas certaine de vouloir m’embarquer dans une lecture d’un sujet qui me terrifie. C’est aussi le fait que ce soit relié au pot qui m’a fait un peu hésiter. Ayant côtoyé et vécu avec des consommateurs sans rien voir qui se rapproche à une psychose, je pensais que c’était peut-être poussé. Jusqu’à ce que je fasse des recherches et que je me rende compte que j’étais celle dans l’erreur (en même temps, entre une auteure qui a probablement fouillé sur son sujet et la jeune femme que je suis, on s’entend que je n’étais pas à ma place). C’est pour ça qu’une après-midi, en allant à la librairie juste pour le plaisir, j’ai pris le tabou. Et il a patienté longtemps dans ma bibliothèque.


Certains romans de la collection apportent des émotions diverses, on peut passer de la joie à la tristesse, être stressé ou en colère même. Celui-ci m’a terrifié. Tout. le. long. J’étais tellement stressée de voir Émile progresser dans l’histoire. J’avais peur, ce ne sont pas des blagues. L’ambiance est assez difficile et je sais que c’est sûrement moi, mais gros OUF. Gros, gros poids à la poitrine tout le long de ma lecture. On embarque dans le sujet assez rapidement et ça empire de plus en plus jusqu’à en être assez inquiétant et stressant. Je crois que le pire dans ma lecture a été le sentiment d’impuissance. Oui, Émile est un personnage, mais j’avais quand même envie de le prendre dans mes bras et de lui dire que ça allait bien aller. Or, une personne en psychose, c’est très difficile de l’aider, parce qu’elle croit que tout est contre elle. Le monde entier est une menace, tout est surveillé, tout est programmé. Vivre c’est être en danger. On ne peut pas réellement aider quelqu’un dans cet état d’âme et c’est horrible, je peux vous l’assurer.


Ariane a réussi, avec une plume légère et agréable à rentrer dans la tête de son personnage et de lui faire vivre la paranoïa sans que ça tombe dans le cliché ou l’irréaliste. En fait, c’est le plus effrayant : tout est possible. Nous, en tant que lecteur, elle nous montre bien qu’Émile exagère, tout en nous montrant la perspective de son propre personnage. On est coincé entre les deux, sans rien pouvoir faire. C’est un sentiment assez étrange et c’est la première fois que je me sens comme ça dans un tabou. C’est même frustrant, parce que tu veux le réveiller, tu te fâches parce qu’il ne comprend pas et tu sais que ce n’est que dans sa tête. Enrageant, épeurant, c’est ce que le livre m’a fait vivre et je vais le dire : c’est une bonne chose. L’expérience vécue m’a traumatisé (bon peut-être pas jusque-là, mais vous comprenez), mais pourtant c’était plaisant à lire.


Les personnages présents sont bien développés et j’avoue les avoir aimés. Dans des histoires comme ça, des fois, ça peut arriver qu’on déteste le conjoint du personnage principal qui souffre. On l’accuse de n’avoir rien fait, de ne pas avoir vu ni compris. Pourtant, Anaïs est un coup de cœur dans le roman. La pauvre essaie simplement de vivre, d’aimer, d’apprendre et de dealer avec le comportement de son petit-ami qui devient incontrôlable. Il est lourd et désagréable. Je suis même étonnée qu’elle soit restée aussi longtemps auprès de lui dans l’histoire, moi à sa place, je ne sais pas ce que j’aurais fait.


Même Ludovic, le meilleur ami et colocataire d’Émile est resté longtemps. La seule chose qui m’a un peu déçu de ce personnage-là c’est le fait qu’il n’ait pas agi avant, pas parler. Il a laissé faire, lui apportait du pot sans arrêt. Bien entendu, ce n’est pas sa faute, mais j’aurais aimé qu’il parle plus, qu’il soit plus présent, qu’il se pose plus de questions. Avoir sa perspective de temps en temps aurait pu, peut-être, amener un petit break à l’histoire qui est difficile à lire à certains endroits.


Selon moi l’auteure a très bien réussi son travail en nous faisant vivre une psychose à travers ses mots. J’avais l’impression de perdre la carte à travers les événements. J’ai quand même eu pitié du pauvre Charles qui, au fond, n’a absolument rien demandé.


La scène du party de Ludo à l’appartement est ma préférée et celle qui m’a le plus fait vivre des émotions. La boule à l’abdomen a pris du temps à partir. C’est fou tout ce que j’ai ressenti ! Entre l’appel téléphonique, le verre, la bataille, les larmes d’Anaïs, le livre me tremblait dans les mains !


Ce qui m’a le plus surpris, c’est d’avoir appris et je l’avoue, j’ai regardé les consommateurs de mon entourage avec un nouvel œil. Je tentais de voir si des signes étranges pouvaient paraîtres. Ça prouve que la Collection n’est pas destinée qu’aux adolescents. Même dans la mi-vingtaine, on peut apprendre et faire quelque chose des informations qu’on lit dans les romans qui y sont publiés.


Les deux seules critiques que j’ai à faire sont les suivantes. Un petit détail qui m’a chicoté ce sont les absences d’Émile au Cégep. Il y a un nombre d’heures que tu peux manquer dans un cours précis avant d’y être « exclu », normalement c’est deux à trois cours maximums. Quand c’est dépassé, l’enseignant peut t’interdire de rentrer dans sa classe, voire même de prendre part aux examens, car ces « étudiants fantômes » ont, la plupart du temps, des notes exécrables, ce qui fait descendre la moyenne de la classe. Émile, après trois-quatre semaines aurait dû être exclues de la plupart de ses cours. Je sais que c’est un détail niaiseux, mais ça m’a préoccupé dans le réalisme.


L’autre critique c’est que j’aurais aimé que la période de l’hospitalisation soit plus décrite et légèrement plus longue. J’aurais aimé en savoir plus sur les méthodes pour faire revenir une personne en psychose sévère à la « normale », les thérapies, le fonctionnement de l’environnement et tout le reste. J’ai trouvé ça un tout petit peu, à peine, vide de ce côté-là. On a vécu la psychose d’Émile pendant un bout, j’aurais aimé vivre plus sa réhabilitation.


À la fin, j’ai été soulagée d’avoir fini ma lecture. J’avais le cœur gros, j’ai pleuré un coup, mais j’ai adoré lire ce livre. Il y avait de quoi d’exceptionnel dans cette histoire-là et je n’avais pas vécu autant d’émotion depuis [V]ivre. Comme quoi les tabous verts font pleurer ! [J’écris cette critique à 23h20, soyez indulgent de mon humour douteux]. Psychose a réussi à prendre sa place dans mes favoris ! J’ai très hâte de lire les autres tabous de l’auteure.


Note finale :


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