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Spécial Tabou : Sexualité

SPÉCIAL TABOU : SEXUALITÉ

Bonjour à tous!

Bienvenue dans cette deuxième critique regroupant d’anciens tabous. Six critiques sont prévues, ayant chacune leur thème : criminalité, sexualité, relations amoureuses, alimentaires, psychologiques et les inclassables.

J’aimerais préciser que certains des romans de la collection pourraient se retrouver dans deux catégories à la fois, mais que j’ai fait un choix de classification.


Pour cette critique-ci, j’ai regroupé des Tabous dont le sujet parle d’orientation sexuelle ou tout simplement de sexualité :


Garçon manqué de Samuel Champagne

Non c’est non de Dïana Bélice

Fille à vendre de Dïana Bélice

Comme un coup de poignard d’Ariane Charland

Recrue de Samuel Champagne

Elle ou lui de Marilou Addison

Le placard et Coming out de Kim Messier (les deux romans seront critiqués ensemble)

Vous trouverez le lien pour les livres en cliquant sur les images. Comme c’est un regroupement de romans et d’auteures différentes, il n’y aura pas de biographies pour des raisons évidentes. Je serais également un peu moins explicite que si c’était des critiques individuelles.

Bonne lecture!

 

GARÇON MANQUÉ de Samuel Champagne — Transsexualité femme à homme

« Oh, la jolie petite fille! » Je suis pas mal sûr que c’est ce qu’on a dit quand je suis né. On a regardé entre mes jambes et le sort en était jeté. Après, ça n’a plus arrêté. « Regarde ses beaux cheveux longs, comme ceux d’un ange », disait toujours mon grand-père. Et mon frère refusait que je reste dans sa chambre quand il était avec ses amis : « Tu ne peux pas jouer avec nous, je ne veux pas d’une petite sœur dans les pattes. » Puis j’entendais ma mère me complimenter : « Éloïse, regarde-toi, ma belle, tu as l’air d’une princesse dans cette robe. »


Éloïse. Je savais que c’était mon nom. Mais qui étaient la sœur, la belle, la poupée dont ils parlaient? Je ne me reconnaissais pas dans ces mots, je me sentais différent et je ne comprenais pas pourquoi. Quelque chose en moi avait mal. Les miroirs et le temps ont répondu à mes questions. J’ai vu un corps de fille. Et pourtant… Malgré mon corps féminin, je sais que ce n’est pas moi. Moi, je suis un garçon. Un gars, un homme, un ti-cul, un dude…


Ou vous pouvez tout simplement m’appeler Éloi.


Parfois, la nature fait une erreur, et un enfant naît dans le mauvais corps. Il se livre alors à un horrible combat intérieur, acceptant difficilement son physique comme étant le sien. Lorsque cette personne prend conscience de sa différence, lorsqu’elle décide que le changement de sexe est sa seule option, un immense processus s’enclenche. L’auteur, lui-même en transition, utilise son expérience pour raconter tous les obstacles inhérents à la transsexualité.


Avant de lire ce roman de Samuel Champagne, je n’avais aucune connaissance de la transsexualité. Je savais que ça existait, mais je ne comprenais pas comment ni pourquoi. J’étais curieuse, mais en même temps effrayé dû à mon ignorance. C’était quelque chose que je ne connaissais pas du tout et qui me rendait perplexe. Comment est-ce possible? Pourquoi? Ne peuvent-ils pas s’accepter comme ils sont? Je me suis posé ces questions-là. En 2014, je n’avais pas vingt ans encore. On ne m’avait pas parlé de ça à l’école. C’était tabou, mais également inexistant.


Ce que j’ai vraiment adoré de ce roman-là, ce sont les connaissances, mais surtout le vécu. On comprend très rapidement le mal-être « d’Éloïse » (que je vais désormais appeler Éloi). Autant dans son corps que dans sa tête. C’est plus qu’une douleur, c’est une plaie ouverte qui ne guérit pas. Son questionnement est légitime et on s’immerge facilement dans l’histoire et le processus d’une transition.


Les personnages sont sincères, ils se questionnent eux aussi. Bien qu’il y ait certaines embûches, notamment au niveau des parents, j’ai aimé comment ça l’a été apporté. Il ne faut pas oublier que ceux-ci doivent faire un « deuil » de leur enfant et c’est toujours difficile à accepter. Ils se demandent si c’est leur faute et surtout si ce n’est pas qu’une simple passe. Autant c’est frustrant, autant c’est réaliste. C’est ce qui a de meilleur avec le roman : le réalisme entourant la transsexualité. Le père d’Eloi me fait beaucoup de peine, car il ne comprend pas et a de la difficulté à vivre, car il a peur. Bien qu’il semble froid la majorité du livre, j’ai aimé sa rédemption.


J’ai aussi beaucoup aimé que l’auteur parle de l’orientation sexuelle de son personnage, car faire une transition ne veut pas dire que l’orientation change. C’est peut-être un détail, mais ça apporte beaucoup au récit.


J’ai trouvé aussi sympathique qu’Eloi ne soit plus seul, qu’il voit d’autres gens mener son combat pour être lui-même. Et le fait que l’histoire avance avec son âge rend vraiment tout intéressant, car ça montre que ça ne se fait pas du jour au lendemain.


En termes généraux, c’est un superbe roman qui apprend, qui joue sur les émotions, qui nous montre un point de vue que nous, en tant que cisgenre, on ne peut pas nécessairement comprendre. Grâce à Garçon manqué, j’ai pu comprendre des amis vivant une transition et juste pour ça, ce Tabou fait parti de mon top dix.


 

LE PLACARD ET COMING OUT de Kim Messier – Homosexualité féminine

À douze ans, Léa se surprend à éprouver une attirance pour une fille. Instinctivement, elle refoule ses sentiments par peur de la différence.


À dix-sept ans, sa véritable nature s’impose de nouveau à elle. Mais Léa n’a pas changé d’avis : toute vérité n’est pas bonne à dire. En tout cas, pas toujours et, surtout, pas la sienne…


Elle choisit donc de vivre dans le mensonge, déchirée entre son désir de se dévoiler et celui de se cacher. Par crainte d’être pointée du doigt. Étiquetée. Mise à l’écart.


S’il fallait que sa famille, ses amis découvrent son secret… L’aimeraient-ils encore? La rejetteraient-ils? Seule Frédérique, sa copine, sait qu’elle est lesbienne. Mais leur amour naissant saura-t-il résister aux cachotteries de Léa?


Dans un monde où l’on présume de l’hétérosexualité des enfants, il est souvent difficile de s’affirmer, de sortir du placard. Et ce, même si les mœurs ont évolué, même si plusieurs clament haut et fort qu’ils ne sont pas homophobes… Ce roman touche un sujet peu traité dans les romans pour adolescents : l’homosexualité féminine.


C’est officiel, Léa sort avec Frédérique. Après une nuit de rêve dans un hôtel luxueux, elle redescend toutefois de son nuage. Alexis et Ariane, ses deux meilleurs amis, ont découvert qu’elle était lesbienne. Elle doit tout leur avouer… Mais pas question de le dire à ses parents!


Craignant que son secret soit dévoilé au grand jour, et déçu par la réaction démesurée d’Ariane, Léa décide de renoncer à l’amour de Fred.

Un an et demi plus tard, elle fait la rencontre d’Anne, qui devient sa nouvelle copine. Aussitôt, les cachotteries recommencent. Mais Léa n’en peut plus d’inventer des histoires… Une importante décision s’impose à elle : il est grand temps de faire son coming out!

Armée de courage et du soutien d’Alexis, Léa élabore un plan pour parler à ses parents. Comment réagiront-ils? Seront-ils déçus? Choqués? Anne, de son côté, réussira-t-elle à se confier aux siens? Son père, cet ignoble homophobe, acceptera-t-il sa fille comme elle est?

Vivre dans le silence n’est pas simple et les deux jeunes femmes apprendront que malgré les conséquences, admettre qui l’on est procure un immense sentiment de liberté.


Pour une adolescente, faire son coming out peut être synonyme de lourdes conséquences, car la crainte de perdre l’affection, l’amour et la reconnaissance de ses proches est omniprésente. L’auteure du Placard, paru dans la même collection, explore de nouveau le sujet de l’homosexualité féminine. Elle démontre cette fois qu’assumer son orientation sexuelle est la meilleure voie à suivre.


À la base, Le Placard avait été catégorisé dans cette section et Coming out dans la catégorie « relations amoureuses », mais j’ai trouvé que finalement, les deux étaient plus « un roman » divisé en deux, j’ai donc décidé de les mettre ensemble et je vais les critiquer ensemble, donc pas un à la fois.


Bon, le premier commentaire que je vais faire, c’est que j’ai trouvé les deux romans lourds, noirs et négatifs. Oui, l’auteure a une belle plume, elle sait mettre en avant les émotions, bien porter ses phrases et écrire avec profondeur ses idées. Le problème a été, pour moi, que l’histoire sortait beaucoup trop du réalisme à mon goût, du moins le deuxième.


Dans Le Placard, on comprend Léa et sa peur de dire aux autres qu’elle est homosexuelle. C’est compréhensible, tous ceux qui doivent faire un coming out passent par là. Les cachotteries, les mensonges, l’incertitude, etc. Le personnage de Léa est particulièrement réaliste. J’ai cependant trouvé étrange qu’après une rencontre avec Julie, à douze ans, elle sache déjà qu’elle est lesbienne et surtout qu’elle connaisse ça. Oui, c’est de plus en plus ouvert, mais j’ai trouvé ça un peu étrange, surtout qu'elle vit dans un foyer où elle a peur d’être rejetée à cause de son homosexualité, où aurait-elle appris sur le sujet? Ça m’a tiqué.


Ensuite, j’ai bien aimé Ariane et Alexis, ensemble, mais séparé, j’ai préféré Alexis. Plus ouvert, plus calme aussi, alors qu’Ariane pète les plombs pour tout et a une personnalité légèrement désagréable.


Puis il y a Frédérique qui est, à mon avis, beaucoup « trop ». Elle force Léa ou la fait sentir coupable pour ne pas avoir fait son coming out. Elle est plus vieille, d’accord, mais j’ai trouvé qu’elle prenait de la place et était à la limite toxique. C’était beaucoup trop pour une jeune fille qui se cherche encore.


Selon moi, les deux tomes auraient dû être ensemble, afin de couper dans le superflu. Il y a plusieurs répétitions, surtout quand Léa parle de sa peur de s’affirmer aux autres. Après un moment on se demande pourquoi elle ne parle pas à un psychologue, un enseignant ou un intervenant. Je me dis que si elle savait pour l’homosexualité, c’est qu’elle a bien dû voir des sites ou des pamphlets?


Puis, il y a Coming out. Autant Le Placard passait dans le questionnement et le fait que ce soit assez négatif, car il est régi par la peur sans avoir de conclusion, autant le deuxième roman n’est pas réaliste du tout pour moi. Honnêtement, si j’avais été lesbienne et non pas bi, en lisant Coming out, jamais je n’en aurais parlé à qui que ce soit, alors que le livre est censé faire l’inverse.


Tout le monde le prend mal. Que ce soient les amis, les parents, bref ça sent l’homophobie à plein nez et le coming out de Léa (et d’Anne au passage) se fait en catastrophe. Oui, certaines personnes peuvent mal prendre que quelqu’un soit homosexuel, malheureusement, mais autant de personnages? J’ai trouvé ça vraiment poussé et pas encourageant du tout... J'avoue que ça m'a énormément déçue...


Il faut attendre la fin de Coming out pour que Léa et Anne s’acceptent et passe à un épilogue légèrement plus réjouissant. J’avoue avoir apprécié cette fin, sauf à un détail près.


Spoiler alert. Lorsque Léa parle de son fils à naître, elle s’inquiète des commentaires qu’il pourra recevoir en ayant deux mamans. C’est légitime. Le problème survient lorsqu’elle se demande s’il sera gay ou si la présence de son grand-père sera une présence masculine suffisante. J’avoue avoir tiqué. J’ai trouvé ça de trop et limite (vraiment limite) homophobe comme raisonnement. Venant du personnage qui s’ouvre sur l’homosexualité, j’ai trouvé ça étrange.


En général, les deux livres ne m'ont pas convaincu pour le sujet. Ils auraient mérités d'être tournés différemment, avec un peu plus de positif pour pousser les jeunes femmes à s’ouvrir. Il manquait de lumière. Un coming out est assez difficile à faire, lire en plus à quel point ça peut être encore plus difficile peut soit montrer un côté « pire que ça peut être » ou leur montrer qu’il faut faire face aux épreuves. Mais il y aurait eu matière à plus de douceur.

 

NON C’EST NON de Dïana Bélice – Agression sexuelle chez les filles

Oui. Non. Le dictionnaire est assez clair sur la définition des deux termes.

Oui : exprime une réponse positive à une interrogation.

Non : préfixe exprimant la négation, le contraire, le REFUS.


C’est ce que j’ai tenté de faire comprendre à Zackary, ce soir-là. Que je ne voulais pas. Même que je lui ai crié. NON! Mais pour lui, ma réponse ne voulait rien dire.


Et maintenant, je ne suis plus que l’ombre de moi-même.


L’agression sexuelle est l’acte criminel le moins signalé à la police. Pourquoi? Parce que la honte et la peur accablent la victime. Parce que la victime doit, en plus, faire face aux préjugés véhiculés par la culture du viol. Encore de nos jours, ce concept nous dicte « de ne pas sortir seules le soir, sinon on cherche le trouble », « de ne pas s’habiller sexy, parce qu’on provoque les hommes », « de ne pas embrasser si on n’est pas prête à aller jusqu’au bout », « de ne pas dire non après avoir dit oui ».


Dans notre société dite évoluée, le fardeau de la preuve appartient toujours à la victime, non à l’agresseur. Il est primordial d’éduquer nos jeunes et de faire changer la honte de camp.


J’ai adoré cette histoire pour plusieurs raisons. J’ai aimé le style de l’auteure pour nous emporter sur un sujet vraiment difficile, mais avec une infinie douceur. Le style vraiment adolescent est bien présent, on reconnaît facilement l’âge des personnages et pourtant, même à vingt-cinq ans, je pouvais me reconnaître chez Emma. Ses émotions, autant positives que négatives, on les sent. Son viol, on le ressent même si on ne l’a jamais vécu. Les préjugés et la culture du viol qui frappent la jeune fille, on le voit aussi.


Ce que j’ai aussi apprécié c’est la ligne directrice du roman. On commence avec une vie normale, un projet normal, un emploi normal, vraiment, qu’est-ce qui aurait pu arriver à Emma? Rien du tout. Elle tombe sous le charme d’un garçon, comme toutes les adolescentes et malgré ses commentaires et ses agissements un peu « too much », ça reste un adolescent qui se découvre. Puis, vient le viol. Quelle scène atroce!


J’avoue que le viol m’a mis tout à l’envers. J’ai eu l’impression d’être témoin et d’être impuissante pour aider le personnage, tellement c’était bien écrit. J’étais en colère contre les gars (car oui, ils sont plusieurs), mais encore plus contre Zachary qui trouvait ça drôle et normal. C’est là qu’on se rend compte qu’il manque une certaine éducation sexuelle!


Autant les hommes peuvent être victime eux aussi, autant (et c’est vu et factuel) les jeunes hommes ont beaucoup de difficulté avec la sexualité. Autant dans leurs commentaires déplacés, que dans leurs actions qui vont trop loin. Bien entendu, ce ne sont pas tous les garçons, mais la plupart qui ont de la misère vont être ceux qui vont trouver le cours d’éducation sexuelle vraiment comique.


On dit aux parents d’apprendre à leur fille à ne pas se faire violer, alors qu’on pourrait juste éduquer à nos enfants, filles ou garçons, à ne pas agresser sexuellement quelqu’un d’autre.


Après le viol, j’ai aimé que l’auteure explique les procédures, le cheminement, et le « après » qui est presque aussi pire que l’agression elle-même. Même si ce côté était à mon goût un peu trop factuel (dans le sens de donner les informations en sortant de l’histoire), j’ai quand même apprécié les personnages présentés et le processus de guérison.


Quant à la culture du viol présent dans le récit, c’est tout simplement horrible. J’imagine à peine comment quelqu’un peut se sentir dans la réalité. J’ai vécu des commentaires de la sorte pour des attouchements, alors pour un viol, je n’imagine même pas… Alors que l’auteure a réussi à faire traverser Emma de cette épreuve aussi réaliste que ça, ça m’a beaucoup plu.


Puis, il y a le fait de s’aimer soi-même à nouveau pour faire confiance à quelqu’un d’autre. C’est quelque chose qui a été amené dans le roman et qui a fait toute la différence. C’est un gros point d’apprendre à aimer son corps à nouveau après un viol, mais de laisser quelqu’un le toucher est encore pire. C’est pour ça que j’ai adoré le personnage de Simon. Bien qu’il ait des lacunes, ce qui est tout à fait normal, sa personnalité m’a beaucoup plu et je l’ai trouvé authentique et parfait pour Emma.


Tous ces petits détails ensemble donnent un très bon livre. Peut-être un peu trop descriptif, mais je crois que c’est quelque chose qui peut facilement être passé par-dessus.

 

FILLE À VENDRE de Dïana Bélice – Exploitation sexuelle

Leïla est une jeune fille de quinze ans. Avec de grands rêves. Avec des espoirs. Avec des envies de liberté. Mais par-dessus tout, elle souhaite trouver l’amour, le vrai. Bref, Leïla est comme toutes les autres filles de son âge.

Du jour au lendemain, elle voit son quotidien paisible s’écrouler. Bouleversée par les agissements de Patrick, son chum, incapable de supporter les moqueries et la cruauté de ses camarades d’école, Leïla prend la fuite. À l’abri de ce qui la fait souffrir, loin de la maison et de sa famille qui ne la comprend pas, elle rencontre le beau Jonathan. Un gars vraiment cool, qui lui fait réaliser que ses rêves, même les plus fous, sont à sa portée.


Pendant plusieurs semaines, Leïla mène la grande vie. Il n’y a plus d’interdits. Grâce à Jonathan, elle se sent comme une adulte, en plein contrôle de sa vie. Les amis du jeune homme – qui le surnomment Young Gun – l’ont acceptée comme si elle était des leurs. Pour une fois, elle se sent à sa place. Appréciée, désirée. Son beau prince l’initie à tous les plaisirs. Mais la fête finit par mal tourner. La vie rêvée se transforme en cauchemar et le réveil est brutal. Sauvage. Inhumain.


L’exploitation sexuelle des jeunes filles par les gangs de rue est un sujet tabou parmi tous les tabous… C’est toutefois le sort que connaissent bien des adolescentes au Québec. Sans voile ni censure, Leïla raconte son histoire en espérant qu’elle permettra à d’autres, comme elle, d’ouvrir les yeux et de tout faire pour s’en sortir. Et éviter les pièges.


Quand la couverture est sortie, je me souviens de m’être dit « A-YO-YE ». Ça fesse solide comme image. J’avais hâte de le lire, pourtant j’ai pris mon temps. J’avais tellement peur du sujet, je trouve ça tellement intense que l’adolescente en moi avait probablement besoin de temps avant de le lire. Je suis contente d’avoir attendu au milieu de ma vingtaine. J’ai été troublée et percutée. J’ai eu besoin de mon regard d’adulte pour admirer ce livre.


Leïla n’est pas un personnage que j’ai pu apprécié autant que je le voulais. Je l’ai trouvé un peu naïve et impulsive, mais en même temps, adolescent, ne le sommes-nous pas tous un peu? J’ai tout de même pu comprendre ses motivations et les décisions qu’elle a prises.


Un des éléments qui m’a beaucoup plu c’est le contexte qui a fait en sorte que Leïla fugue. Ses parents sont froids, ne l’écoute pas, ne se soucie pas d’elle (du moins c’est ce qu’elle pense). Son « petit-ami » est une merde. Elle est intimidée aussi. Ridiculisée. Elle pense qu’elle serait mieux ailleurs et je la comprends. Le fait que l’auteure n’ait pas créé de scènes rocambolesques a donné une touche de réalisme au récit. C’est quelque chose qui peut arriver à tout le monde, même si je ne le souhaite pas à personne. Cette touche de réalisme met en place une histoire crédible.


L’autre élément que j’ai adoré, c’est la manipulation parfaitement visible dès l’entrée en scène de Jonathan. Un adolescent ne le verra peut-être pas tout de suite, mais en tant qu’adulte, je l’ai tout de suite vu. La mise en scène du chien, la générosité exagérée. Tout est mis en place pour partir en cacahuète. Mais pour une jeune fille vulnérable et brisée, c’est facile de jouer sur la gentillesse pour la pousser à faire ce qu’on veut. Ensuite c’est de la rendre redevable et coupable, pour qu’elle fasse ce dont elle n’a jamais voulu faire. L’autre élément perturbateur : la drogue. C’est important dans cette histoire et Dïana a bien jouer avec la dépendance pour montrer le changement de personnalité qui peut se produire chez un personnage. Juste cette construction m’a poussé à adorer ce livre.


Chaque personnage est bien construit, à sa place et montre l’influence qui se passe dans le milieu du trafic sexuel. Il y a une hiérarchie et un respect envers le « maître », celui qui collecte et contrôle. Leïla se voit rapidement piégée et même en tant que lecteur, on ne sait pas trop comment elle va pouvoir s’en sortir. À l’extérieur, on se dit : oui, mais part. Mais ça ne fonctionne pas comme ça, car le cerveau est brainwasher et dépendant. Elle est accro à la drogue qu’elle sait qu’elle n’aura plus si elle part. Elle sait aussi qu’elle peut être en danger si elle part ou si elle parle. C’est pour ça que j’ai adoré la scène de la clinique. La peur dirige et elle se ressent à travers le texte.


J’ai cependant trouvé la fin légèrement farfelue. Un « mac » ne laissera pas sa marchandise sur le bord de la route, parce qu’il aura peur qu’elle parle. Surtout sachant ce qui s’est passé dans l’histoire avec Annabelle. J’ai trouvé ça un peu facile et étrange. En revanche, la guérison autant physique que mentale de Leïla est très bien construite. J’aurais simplement aimé plus de conséquences de son action après son retour à la maison. Auprès de ses parents, auprès des gens qui exploitent les jeunes filles. Quels sont les impacts sur les autres? Il en manquait un peu à mon goût.

C’est un roman qui fait peur et qui déstabilise. Si les jeunes femmes peuvent lire et comprendre les signaux d’alarme, les conséquences qui peuvent amener à faire confiance, à faire attention, alors l’auteure aura réussi son travail. Honnêtement, je n’ai pas d’inquiétude. Même à mon âge, j’ai appris et compris beaucoup de choses.


 

COMME UN COUP DE POIGNARD d’Ariane Charland – Les douleurs sexuelles

La première fois.


Certains disent que c’est magique. D’autres que ça fait mal, mais que ça passe.


Pour moi, ça n’a pas été magique, et ça n’a pas passé. La douleur, je veux dire. C’est resté. Même que c’est pire.

Je suis défectueuse.


C’est pour cette raison que je me ferme aux gens que je détourne les yeux chaque fois qu’un garçon m’intéresse. Je ne veux pas courir le risque de plaire. Je ne veux pas être obligée d’avouer que le sexe, dans mon cas, est une torture. Alors je feins l’indifférence et me convaincs que tout va bien.


Mais ça, c’était avant de rencontrer Luka. Avec lui, c’est différent. Ma carapace se fendille et mes mécanismes de défense s’enrayent.


Maintenant plus que jamais, j’ai envie d’être comme tout le monde.


Les douleurs sexuelles touchent environ 20 % des adolescentes et de 12 à 21 % des femmes adultes. Pourtant, c’est un sujet très peu abordé dans les médias et, pour plusieurs, il demeure honteux. Alors que le sexe, lui, est omniprésent à la télévision, dans les magazines et sur Internet, ce type de douleur entraîne trop souvent un sentiment de détresse et de culpabilité chez celles qui en souffrent.


Les douleurs sexuelles. Un sujet auquel je ne m’attendais pas et dont je n’avais pas beaucoup entendu parler. C’était donc l’occasion pour moi d’en apprendre un peu plus sur ce phénomène qui est plus que tabou. Mais je vais être honnête, je n’ai pas l’impression d’être sortie de ma lecture avec plus d’information que lorsque je l’ai commencé. À mon avis, il manquait d’information pour rendre la lecture beaucoup plus poignante et informative. La plume d'Ariane est superbe et j'avais lu d'autres romans d'elle avant, ce qui a peut-être influencé mon appréciation de lecture.


J’ai adoré les personnages. Jeanne et Luka ont chacune une personnalité qui se complète. La narration à deux voix apporte une touche de légèreté au récit, ainsi qu’apporter une multitude de perspectives. On voit à travers un regard différent certaines situations et ça permet vraiment de faire un 360 d’une scène. C’est un des plus grands avantages du roman.


J’ai aimé que Jeanne explique sa maladie, les différences qu’il y a aussi. Mais j’ai trouvé ça trop explicatif, plus que de se concentrer sur le vécu. Même si on a certaines scènes qui décrivent la douleur de la jeune femme, j’ai trouvé que la première fois, « l’importante », n’était pas assez émotive, parlante, douloureuse. J’aurais voulu le ressentir plus. Je sais que l’auteure peut le faire, car elle l’a parfaitement fait avec Psychose, ici, j’ai trouvé que ça restait peut-être un peu trop en surface.


Soledad est une petite touche rafraichissante à l’histoire, car elle apporte de la vitalité (malgré ses problèmes de cœur), tout comme Maya-Anne qui est, oui, la méchante, reste qu’elle apporte une touche de « spicy » à l’histoire.


Le problème que j’ai rencontré à ma lecture est que j’ai eu plus l’impression de lire un roman sur les problèmes relationnels que sur les douleurs sexuelles. On le voit de temps en temps, surtout lorsque Jeanne et Luka doivent apprendre à doser leurs relations et à « s’exercer ». Mais le reste du roman, c’est vraiment les conflits que Jeanne a intérieurement et les conflits personnels entre tout un chacun.


J’aurais voulu en savoir plus. Vivre plus. Apprécier plus. C’est un bon roman pour son histoire. Mais pour le sujet, il en manquait pour moi.


 

RECRUE de Samuel Champagne – Homosexualité masculine

Une recrue… Voilà comment Thomas se sent. Un nouveau, un débutant. Dans un univers qu’il ne connaît pas et qui lui fait très peur : celui de l’homosexualité.

Alors que Maxence, fraîchement débarqué d’Angleterre, semble s’intéresser à lui, Thomas se pose bien des questions. Leur relation déborde-t-elle du cadre de l’amitié? Max, ce sportif populaire, peut-il réellement être gai? Il n’en a pourtant pas l’air…

À seize ans, Thomas a de la difficulté à le croire, mais il finit par l’admettre : il aime les hommes. Déjà que son quotidien n’est pas simple alors que sa passion pour la danse attire sur lui les propos homophobes de ses camarades, l’avenir s’annonce encore plus compliqué… Quant à Max, il s’ennuie de la liberté d’agir qu’il avait à l’étranger, et de ses amis qui l’acceptaient tel qu’il est. Osera-t-il s’afficher ouvertement de nouveau?

Ensemble, les deux garçons découvrent le véritable amour. Pourquoi se cacher quand ce qui nous anime est si beau, si enivrant? Pour s’affirmer, il faut être prêt à affronter le regard des autres. Un regard souvent dur et rempli de jugements… Environ 5 % de la population mondiale est homosexuelle. Mais trop peu de jeunes admettent leur différence, de peur d’être rejetés. L’histoire de Maxence et de Thomas nous permet de constater les nombreuses embûches que rencontrent les adolescents lorsqu’ils découvrent que leur orientation sexuelle est contraire à la « norme ». Dans une société qui se dit moderne et ouverte d’esprit, des efforts sont encore nécessaires afin que les tabous entourant l’homosexualité masculine disparaissent.


J’avoue que j’ai eu du mal avec le début du roman. Je n’arrivais pas à m’immerger complètement ou à bien cerner les personnages. Quelque chose me bloquait et ça l’a pris le premier 100 pages avant que j’embarque pour ne plus vouloir en sortir. En même temps, je crois que c’est un peu compréhensible. En tant que femme, l’homosexualité masculine me touche un peu moins. De plus, comme c’est un peu moins tabou, je n’ai pas eu l’impression de devoir apprendre d’un livre sur le sujet. Bien entendu je me suis trompée.


Un des principaux éléments du roman c’est l’homophobie. Et j’ai trouvé ça important qu’il y en ait. Parce que même en 2020, il y a encore des gens qui jugent et rit des homosexuels. Le pire c’est que lorsque ce sont deux femmes, ça passe mieux que deux gars qui perdent automatiquement leur virilité et deviennent des « fifs », des « tapettes », des « feluettes ». Ce n’est pas normal qu’il y ait autant de synonymes péjoratifs pour parler d’un couple de gars qui s’aiment.


Thomas est victime de préjugés, parce qu’il fait de la danse contemporaine. Un danseur, c’est automatiquement gay. L’auteur prouvera que non à la fin du roman. Bien que Thomas le soit réellement, il est un peu poussé par les ragots à réfléchir à son orientation, alors qu’il n’y pensait pas réellement, n’éprouvant pas de désir ni pour les filles ni pour les garçons, jusqu’à l’arrivée de Maxence. J’ai beaucoup aimé sa personnalité et la construction du personnage. Il est doux, mais également très fort. J’aime qu’il prenne position sur ses passions. Il vit et se fiche des autres, malgré les blessures que ça lui fait en dedans.


Quant à Maxence, j’ai aimé son caractère et qu’il sortait des stéréotypes qui sont attribués aux homosexuels (en fait, les deux garçons n’ont pas le « look », pourquoi? Parce qu’un homosexuel n’a pas un look particulier). J’ai aimé comment l’auteur a dû montrer qu’il est possible de devoir faire un second Coming Out. En effet, comme Maxence vient d’un autre pays, il n’est pas ouvertement affiché dans sa terre d’accueil et lorsqu’il entend les commentaires de ses camarades de « foot » (soccer) il ne veut pas dévoiler son homosexualité. Il se retrouve à nouveau dans le placard.


J’ai adoré voir le coming out de Thomas (WOW avec sa mère, une des meilleures scènes que j’ai lues, j’ai adoré!), ainsi que les questions et réflexions que Maxence doit reprendre du début. C’est aussi un conflit interne qui nous est présenté, car il est prisonnier entre-le-lui « d’avant », affiché qu’il était en Angleterre et celui de maintenant, au Québec dans le placard. J’aime comment la relation entre les deux amis se développe de plus en plus jusqu’à devenir plus sérieuse et qu’ils s’aident mutuellement.


Je m’avoue un peu déçue de la décision de Maxence envers Simon et je suis déçue que celui-ci n’ait pas eu plus de conséquences pour ses gestes et son homophobie. Que l’école n’ait rien fait, malgré les « red flag » flagrants! C’est peut-être le seul défaut que je donnerais à l’histoire. Ça manquait de claque en arrière de la tête.


Mais en général, des personnages bien construits, un récit bien ficelé et une belle conclusion. Même si j’ai trouvé le début un peu lent pour moi, je suis tout de même rentrée dans l’histoire et j’ai adoré ma lecture. Une autre réussite signée Samuel Champagne.


 

ELLE OU LUI de Marilou Addison – Bisexualité

Capitaine de son équipe de hockey, adolescent populaire et respecté, Dominic n’a rien à envier à qui que ce soit. Sa blonde, Camille, est sûrement la plus belle fille de l’école, et il l’aime plus que tout. Sans compter ses nombreux amis avec qui il adore faire la fête.


Malgré tout, le jeune homme se sent différent. Depuis quelque temps, il éprouve des désirs qu’il ne peut plus ignorer. Surtout lorsque Karl débarque en ville et chamboule sa vie, lui faisant découvrir une autre facette de sa personnalité. Au fil de leurs rencontres, Dominic commence à comprendre qui il est vraiment.


Que faire quand les filles et les garçons nous attirent, mais qu’on sait à l’avance que personne ne pourra l’accepter? Tant de gens le voient comme un ado parfait… Tant de gens que Dominic a peur de décevoir s’il dévoile sa vraie nature.


Beaucoup considèrent la bisexualité comme de l’homosexualité refoulée. D’autres pensent qu’il s’agit d’une excuse pour entretenir des relations sexuelles avec plusieurs partenaires à la fois. Même au sein de la communauté gaie, nombre de bisexuels se font rejeter, accusés de n’appartenir à aucun groupe. Trop peu comprennent qu’ils s’autorisent simplement à être amoureux, avant tout, d’un autre être humain. Sans se limiter à son genre.


Je vais y aller de but en blanc, je n’ai pas détesté ce roman, mais je ne l’ai pas aimé non plus. Je suis bisexuelle, je ne le cache pas, je n’en ai pas honte. Autant je me suis reconnue dans certains passages (surtout dans le questionnement de Dominic), autant j’ai trouvé des passages beaucoup trop stéréotypés. Cependant, j’ai tout de même trouvé que c’était un bon livre. Je le dis d’emblée, parce que mes commentaires vont peut-être vous faire questionner à savoir si j’ai aimé ou pas, c’est normal.


Dominic est un personnage attachant. J’ai aimé que pour parler de bisexualité, l’auteure ait choisi un garçon. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai l’impression que beaucoup assume que toutes les femmes ont des tendances bisexuelles, mais les hommes non. J’ai aimé son questionnement, j’ai aimé son évolution, sa perdition et sa rédemption. Cependant, je l’ai trouvé un peu trop cliché. Gars super beau, populaire, qui sort avec la plus belle fille de l’école. D’un sens, ça montre que n’importe qui peut être bi, mais en même temps je trouvais que c’était légèrement trop stéréotypé.


C’est la même chose pour Camille, bien que sa section à elle, je l’ai trouvée plus posée, plus réfléchie, plus mature. J’ai bien aimé son personnage dans la partie ELLE. On voit une deuxième perspective à sa personnalité. Lorsqu’elle apprend la bisexualité de Dominic, j’ai bien aimé sa réaction. Ses montagnes russes sont justifiées.


Pour Karl c’est une autre chose. J’ai détesté son attitude. Je l’ai trouvé superficiel, manipulateur, toxique, voire même méchant. Il pousse à bout Dominic comme si c’était son bien. J’ai trouvé sa relation avec le jeune homme vraiment étrange et même déstabilisante. J’aurais apprécié quelqu’un d’un peu plus « effacé »? Plus calme peut-être. Disons que j’ai été soulagée quand il est parti. Spoiler alert, sorry. Mais j’ai trouvé que c’était la meilleure chose qui pouvait arriver à Dom!


Quant à la plume, les émotions sont vraiment là, c’est bien écrit, l’histoire est bien ficelée. J’ai aimé que le récit soit séparé en trois parties : LUI, ELLE et MOI. Ça fait différent et rafraîchissant.


Je dirais aussi que l’évolution de Dominic apporte le côté qui m’a plu le plus. Il passe d’un être très superficiel à plus posé.


Cependant, l’homophobie présente dans le livre, je l’ai trouvé légèrement « too much ». Nécessaire, car c’est commun l’homophobie lorsque c’est un coming out où la relation est homme-homme. Mais j’ai trouvé ça extrême un peu et assez cliché. Mais j’ai bien aimé la rédemption du père. Quant à Stéphane, j’aurais aimé qu’il comprenne avant l’épilogue (même rendu là c’était ambiguë).


Le personnage qui n’a pas eu assez d’attention, c’est Colin. J’aurais aimé qu’il prenne plus sa place, qu’il est un peu plus son importance, qu’il voit plus, qu’il réfléchisse plus. Il est là, il est important, mais pas assez à mon goût.


En général, c’est un bon roman, mais il manquait des trucs pour que ce soit à mon goût, c’est donc personnel. Peut-être que le sujet me rejoint un peu trop...


 

C’est ce qui conclut la deuxième catégorie du spécial Tabou! J’espère que ça vous aura plu! N’hésitez pas à laisser un commentaire, à liker et partager!


À la semaine prochaine!

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