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Le désordre naturel des choses de Camille Beauchamp


TITRE : Le désordre naturel des choses

AUTEURE : Camille Beauchamp

ÉDITION : Hurtubise


GENRE LITTÉRAIRE : Contemporain

NOMBRE DE PAGES : 264


RÉSUMÉ : À vingt-sept ans, Sophie apprend qu’elle ne pourra jamais avoir d’enfant naturellement. Cette nouvelle l’oblige à s’assumer pleinement : elle ne veut pas devenir mère, point. Au fond, elle l’a toujours su, mais elle taisait jusqu’ici sa petite voix intérieure. S’ensuivent une séparation, un déménagement et une remise en question sur son identité ainsi que sur les rêves qui l’habitent. Elle doit aussi affronter les réactions de son entourage en plus d’un lot impressionnant de critiques et commentaires.


En faisant du bénévolat dans une résidence pour personnes âgées, Sophie rencontrera notamment Irène, une octogénaire qui n’a pas la langue dans sa poche. La jeune femme réalisera qu’un avenir sans enfant ne veut pas nécessairement dire une vie sans amour.


Un roman lumineux et touchant, qui se lit comme une ode à la liberté de choix face au soi-disant ordre naturel des choses.

 

MON AVIS :


Ce livre m’a parlé dans tous les sens du terme. Étant confronté à des problèmes de fertilité et en étant dans une situation où vouloir des enfants n’est pas au sujet du jour, j’ai pu connecter énormément avec Sophie.


Je me suis longtemps mis de la pression pour avoir des enfants. Je viens d’une petite famille qui ne l’a pas toujours eu facile, très peu de membres à Noël quand nous sommes dans notre modeste cocon, je désirais avoir une grosse famille à moi ! En plus, en étant l’aîné des arrière-petits-enfants d’une femme encore en vie, je me disais que c’était mon rôle et mon devoir de lui donner un arrière-arrière-petit-enfant, vous voyez ? J’étais dans l’illusion que, pour être à ma place, pour me sentir bien, je devais avoir des enfants, reconstruire ma famille avec un homme et ne pas faire vivre le dysfonctionnement que j’ai vécu étant petite avec un père absent et une mère dépendante. C’est en rencontrant mon copain actuel que j’ai réalisé qu’une vie sans enfant n’allait pas me rendre malheureuse. Étant atteint d’une stérilité dégénérative et moi, ayant des problèmes de fertilité aussi, nos chances sont minces ! Ce serait donc, comme Sophie, obligatoire de passer par des traitements de fertilité interminables dans l’espoir d’un gros peut-être. C’est pourquoi ce livre est venu me frapper de plein fouet. Néanmoins, contrairement à Sophie, bien que pour l’instant et que c’est à 90 % décidé qu’un enfant ne fera pas partie de notre vie, nous laissons la porte ouverte à un peut-être dans quelques années, car on ne sait jamais ce qui peut arriver dans l’avenir.


Je vais donc commencer avec un point important qui m’a plu et le seul élément négatif qui a fait en sorte que ce ne fut pas un coup de cœur. Le réalisme de l’histoire est incroyable, mais aussi terrifiant. Tout le monde ne se gêne pas pour adresser des commentaires à Sophie, comme si être une femme l’obligeait à être mère. C’est irrespectueux, mais tellement réaliste. Il faut systématiquement se justifier, s’expliquer et devoir faire affaire à ceux qui souhaitent nous faire absolument changer d’idée avec des arguments bidon du genre : « oui, mais tu vas faire quoi quand tu seras vieille, qui va s’occuper de toi ? », « mais tu ne connaîtras jamais l’amour inconditionnel que tu vis avec ton enfant ! », « tu peux toujours adopter si tu ne peux pas en avoir, il y a trop d’enfants malheureux qui veulent juste un foyer » (oui, rendre coupable est un argument récurent qui me donne envie de répliquer avec un « et toi, pourquoi tu as des enfants biologiques alors ? »). Bref !


Je mentionne également que, non seulement c’est lourd, c’est aussi irrespectueux à un point que vous n’imaginiez même pas. Dites ça à une femme qui est en essai bébé depuis des mois, mais qui n’en parle pas ; à une femme qui vient de faire une fausse couche et garde le tout sous silence par honte ; qui est simplement infertile, peu importe la raison. Se faire constamment parler de bébé et de « ce sera ton tour un jour », c’est non.


La seule chose que je reproche au livre c’est que, malgré le réalisme de la situation, chaque rencontre, chaque personnage qui croise la route de Sophie, même si ce sont de purs inconnus, lui adresse un commentaire sur les bébés, ce qui crée une redondance. Oui, beaucoup ne se mêlent pas de leurs affaires, mais comme c’est condensé dans un livre et que tous les personnages s’en mêlent, ça m’a un peu agacé.


Concernant les personnages, j’en ai haï et adoré d’autres. J’aimerais commencer par une remarque sur un passage au début du livre, entre Mathias et Sophie. À la base, l’envie de bébé venait principalement du jeune homme, c’est quelque chose de très important pour lui. Sophie arrive par conséquent avec une bombe en lui disant qu’elle ne peut pas avoir d’enfants. Il va donc lui laisser du temps, mais aussi essayer de la convaincre d’avoir recours à des traitements pour avoir un bébé avec des tactiques un peu minables. C’est là que sa petite-amie lui annonce sèchement qu’elle n’en veut pas et qu’il lui lance au visage qu’elle est égoïste. Sachez que je suis d’accord et pas d’accord avec lui, alors que j'estime que la majorité ne sera pas en accord avec cette insulte. La raison pour laquelle je suis la pensée populaire et que je suis en désaccord avec son propos, c’est qu’il n’y a rien de moins égoïste que de penser à soi au lieu de se forcer à élever une vie qu’on risque de ne pas aimer, d’être détaché et surtout, d’avoir du ressentiment à son égard. Cependant, je trouve qu’il a raison de la traiter d’égoïste à cause du point suivant : ils sont rentrés dans une relation dans l’idée classique de la maison, du mariage et des bébés. Elle est entrée, volontairement, dans les essais bébés, car elle en « voulait un », jusqu’à tant qu’elle apprenne la nouvelle de son infertilité et qu’elle comprenne qu’elle n’en a jamais désiré. Elle avait refoulé ses pensées et n’en avait jamais parlé. Elle avait donc donné de l’espoir à Mathias et, en décidant de ne pas en avoir, elle lui impose sa décision, lui qui rêve d’être père. Alors, oui, c’est égoïste dans ce sens-là. C’est son corps, elle peut faire ce qu’elle veut avec, mais elle ne peut pas l’obliger à renoncer à son désir profond, juste parce qu’elle, elle ne le souhaite plus.


J’ajoute aussi une parenthèse nécessaire ici. Plusieurs croient que parler de mariage, de bébé et d’avenir à la première date est malaisant et risque de faire fuir l’autre. Si la personne se sauve, c’est qu’elle est immature, car ce sont les bases ! Pourquoi s’investir dans une relation pour ne pas vouloir la même chose pour votre futur ? Bien entendu, ces désirs peuvent changer, de la même manière que ça l’a été le cas pour Sophie ! Mais, ça se discute ces affaires-là ! Même si vous trouvez une personne incroyable, si celle-ci ne souhaite pas d’enfant et que vous, oui, vous serez malheureux, puisque l’un des deux devra faire un sacrifice important. Exactement comme Sophie l’explique avec Mathias. Soit elle devra s’obliger à avoir une fécondation in vitro, soit lui il sera obligé de renoncer à son rêve. Un des deux sera misérable à cause de l’autre. Établissez donc les bases dès le début. C’est pourquoi j’ai compris un peu la réaction de Zach, un des préposés dans la deuxième partie du roman, même si son comportement était inadmissible.


Autre parenthèse en rapport avec l’égoïsme. La mère de Sophie la traite aussi d’égoïste et là, non, elle n’a aucun rapport dans cette décision, la mégère au balai dans le cul. Mathias avait son importance parce que c’était son partenaire de vie. Si madame est déçue de ne pas avoir un autre petit enfant, qu’elle se prenne un chien ! L’ironie, c’est qu’elle lui lance l’insulte en visage, tout en lui imposant une vie pour qu’elle puisse bien paraître. C’est qui la plus égoïste des deux, Karen ?

Point positif à tout ça, j’ai adoré que la séparation de Sophie et Mathias ne traine pas et que les deux agissent en adulte vis-à-vis la situation. Ce n’est pas un manque d’amour, simplement une incompatibilité. C’était parfait.


Contrairement à la famille de la jeune femme qui m’a répugné  ! C’est à cause de ce genre de personne qu’il y a tant de gens malheureux qui se conforment à la société sans le vouloir et qui finissent en dépression à 40 ans. Sa sœur, miss parfaite, me donnait envie de lui fracasser les palettes d’en avant.


La deuxième partie du roman se concentre essentiellement sur Sophie et Irène, une dame qui demeure à la résidence de personne âgée où travaille la meilleure amie de Sophie, Léa (que j’ai adoré au passage. Je mentionne aussi ici que j’aurais aimé un peu plus de présence des deux autres amies, Jade et Mégane, je crois). Même si Irène est censée avoir tout un caractère, difficile à approcher, je l’ai trouvé douce et joyeuse, principalement car elle semble avoir une affection immédiate pour la jeune bénévole. J’ai aimé qu’on en apprenne sur la vie de l’aîné, sur l’époque dans laquelle elle a vécu plusieurs remous, sur sa vie en tant que femme mariée et en tant que mère. Et surtout, que ça ne l’a jamais rendue plus heureuse d’avoir eu deux filles, au contraire. Outre un petit fils, Jacob, qu’elle affectionne beaucoup, cela ne lui a pas donné grand-chose. Jacob est justement un personnage que j’ai apprécié. Un peu cliché, mais qui fait du bien.


La fin, même si elle est triste, reste d’une beauté sans nom. J’ai l’impression qu’il y aura possiblement une suite… et en vrai, j’aimerais beaucoup ça, car j’adorerais retrouver Sophie et Jacob.

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